travail 28 juillet: la liberté à la tête du peuple

le soulèvement de Paris des 27, 28 et 29 juillet 1830, connu sous le nom des Trois Glorieuses, a été initié par les républicains libéraux pour violation de la Constitution par le gouvernement de la Seconde Restauration. Charles X, Le Dernier Roi Bourbon de France, a été renversé et remplacé par Louis Philippe, duc d’Orléans., Delacroix, qui a été témoin du soulèvement, l’a perçu comme un sujet moderne pour une peinture; l’œuvre résultante reflète la même ferveur romantique qu’il avait appliquée au Massacre de Chios, un tableau inspiré de la guerre d’indépendance grecque.

un acte patriotique

L’imagination de Delacroix a été tirée par toutes sortes de choses—le monde naturel, une voûte nervurée Gothique, un félin, un voyage, une passion humaine… ou un événement qui a changé le cours de l’histoire et inversé les tendances artistiques. Il a traduit ses émotions profondément ressenties en peinture, renouvelant constamment son style., Son tempérament émotionnel explique en grande partie la force de sa représentation de la récente explosion de rage dans les rues de Paris.

Sans doute ressent-il aussi une implication personnelle, à travers son amitié avec des protagonistes du conflit comme Adolphe Thiers, qui hésite entre le maintien de la monarchie constitutionnelle et la restauration de la République., Delacroix dépendait de commandes d’institutions et de membres de la famille royale, et son ambiguïté personnelle le cantonnait probablement au rôle de simple spectateur (noté par Alexandre Dumas), mais en tant qu’artiste citoyen, il contribua à protéger les collections du Louvre des émeutiers et, nostalgique de l’Empire napoléonien, fut ému de voir le drapeau tricolore hissé au sommet de Notre-Dame par les insurgés.

Le moment était venu pour accomplir son propre devoir patriotique. Il écrit à son neveu Charles Verninac: « trois jours au milieu des coups de feu et des balles, car il y avait des combats tout autour., Une simple poussette comme moi courait le même risque d’arrêter une balle que les héros impromptus qui avançaient sur l’ennemi avec des morceaux de fer fixés aux poignées de balai. »

Delacroix commence son interprétation allégorique de L’épopée parisienne en septembre 1830. Sa peinture a été achevée entre octobre et décembre, et exposé au Salon en mai 1831.

comme c’était son habitude, il a développé son plan pour la peinture en utilisant des croquis préliminaires pour chaque élément et à chaque étape. Il puise également dans le répertoire de motifs qu’il a compilé quotidiennement depuis le début de sa carrière., Il a ainsi achevé le travail en trois mois, en se concentrant sur l’impact dramatique et visuel de la scène: la foule franchissant les barricades pour faire son assaut final sur le camp ennemi.

le pic de ferveur occasionné par la victoire est représenté dans une composition pyramidale; la base, parsemée de cadavres, ressemble à un piédestal supportant l’image des vainqueurs. Delacroix avait utilisé une composition tout aussi rigoureuse pour son tableau intitulé La Grèce sur les ruines de Missolonghi, et une structure comparable est apparente dans le radeau de la méduse de Géricault., Ici, il sert à contenir et à équilibrer le pinceau vigoureux du peintre, et le rythme impétueux de la scène.

Une révolution Parisienne

L’allégorie de la Liberté est personnifiée par une jeune femme du peuple portant le bonnet Phrygien, ses boucles s’échapper sur son cou. Vibrante, ardente, rebelle et victorieuse, elle évoque la Révolution de 1789, les sans-culotte et la souveraineté populaire. Dans sa main droite levée se trouve le drapeau rouge, blanc et bleu, symbole de lutte qui se déploie vers la lumière comme une flamme.,

Liberty porte une robe jaune rappelant la draperie classique, maintenue à la taille par une ceinture dont les extrémités flottent à ses côtés. Il a glissé sous ses seins, révélant les poils des aisselles considérés comme vulgaires par les artistes classiques qui ont décrété que la peau d’une déesse devait être lisse. Le réalisme érotique de sa nudité rappelle les anciennes victoires ailées. Son profil Grec, son nez droit, sa bouche généreuse, son menton délicat et son regard couvant rappellent la femme qui a posé pour les femmes D’Alger dans leur appartement., Elle se tient noble et résolue, son corps Illuminé à droite, coupant une figure distincte parmi les hommes alors qu’elle tourne la tête pour les inciter à la victoire finale. Son côté gauche sombre se détache contre un panache de fumée. Son poids est sur son pied gauche nu, visible sous sa robe. Elle a peut-être une allégorie, mais c’est une vraie bataille, et elle est prise dans le feu de l’action. Le canon d’infanterie à baïonnette (modèle 1816) dans sa main gauche lui donne un look contemporain et une certaine crédibilité.,

deux oursins Parisiens se sont spontanément joints au combat: celui de gauche s’accroche aux pavés, les yeux écarquillés sous sa casquette d’infanterie légère; le personnage le plus célèbre à droite de la liberté est Gavroche, symbole de la révolte de la jeunesse contre l’injustice et le sacrifice pour une noble cause. Il arbore le béret en velours noir (ou faluche) porté par les étudiants, comme un symbole de rébellion, et porte une grande pochette de cartouche en bandoulière sur son épaule. Il avance pied droit en avant, brandissant des pistolets de cavalerie avec un bras levé, un cri de guerre sur ses lèvres alors qu’il exhorte les insurgés à se battre.,

Le combattant dont le béret porte une cocarde royaliste blanche et un ruban libéral rouge et qui porte un sabre d’infanterie (modèle 1816) ou briquet, est reconnaissable à un ouvrier d’usine avec son tablier et son pantalon de marin. L’écharpe qui tient son pistolet en place sur son ventre évoque le mouchoir de Cholet, signe de ralliement du chef royaliste Charette et des Vendéens.

La figure agenouillée avec le chapeau haut-de-forme d’un bourgeois ou d’un citadin à la mode peut être Delacroix lui-même, ou l’un de ses amis. Il porte un pantalon ample et une ceinture en flanelle rouge d’artisan, et porte un fusil de chasse à double canon., Le blessé qui se relève à la vue de la liberté porte une écharpe jaunâtre nouée, faisant écho à la couleur de la robe de l’héroïne; sa blouse de paysan et sa ceinture de flanelle rouge suggèrent les travailleurs temporaires de Paris. La veste bleue, la ceinture rouge et la chemise blanche font écho aux couleurs du drapeau.

un sujet moderne

« j’ai entrepris un sujet moderne, une barricade, et bien que je n’aie peut-être pas combattu pour mon pays, au moins j’aurai peint pour elle. Il a rétabli ma bonne humeur  » (lettre du 28 octobre à son frère)., Les soldats allongés sur le sol occupent le premier plan à la base de la structure pyramidale. Outre la figure de la liberté, le cadavre sans pantalon à gauche, bras tendus et tunique retournée, est une autre référence mythique, dérivée d’un modèle nu classique connu sous le nom D’Hector—une personnification du héros homérique. Le Garde Suisse allongé sur le dos, à droite de la scène, a un uniforme de campagne contemporain: un manteau gris-bleu avec une décoration rouge sur le Col, des guêtres blanches, des chaussures basses et un shako., Un cuirassier blanc, épaulette, le visage allongé à côté de lui, est visible jusqu’à la taille.

à gauche à l’arrière du triangle se trouvent des étudiants (dont un étudiant de L’Ecole Polytechnique avec son chapeau bonapartiste) et un détachement de grenadiers en grand manteau gris et uniforme de campagne.

bien que le fond droit du tableau contienne des éléments d’un paysage urbain, il semble vide et distant par rapport à la bataille rangée qui remplit le côté gauche de la scène., Les tours de Notre-Dame représentent la liberté et le romantisme—comme pour Victor Hugo—et situent L’action à Paris. Leur position sur la rive gauche de la Seine est inexacte, et les maisons entre la cathédrale et le fleuve sont de purs produits de l’imagination du peintre. Une lueur de coucher de soleil, mêlée à la fumée de canon, illumine les postures baroques des corps et brille dans le fond droit, créant une aura autour de la liberté, du jeune garçon et du drapeau tricolore.,

Comme nous l’avons déjà vu, la composition est donnée à l’unité par l’utilisation particulièrement habile de la couleur par le peintre; les éléments bleus, blancs et rouges ont des contrepoints; le blanc des sangles parallèles sur les épaules des combattants fait écho à celui des guêtres et de la chemise sur le cadavre à gauche, tandis que la tonalité

Delacroix était admiré par Charles X, qui acheta le Massacre de Chios et la mort de Charles Le Téméraire. Les amis de l’artiste comprenaient la Duchesse de Berry et la famille Orléans., Il aimait attirer l’attention dans les cercles du pouvoir et marquer l’opinion publique, mais était considéré à cette époque comme le leader du mouvement romantique et était passionné par la liberté. Son émotion pendant les trois jours glorieux était sincère, et a été exprimée à la gloire des citoyens « nobles, beaux et grands » de son pays.

La peinture historique et politique de Delacroix—mélange de document et de symbole, d’actualité et de fiction, de réalité et d’allégorie—témoigne des affres de l’Ancien Régime.,
cette œuvre réaliste et novatrice, symbole de la liberté et de la révolution picturale, a été rejetée par la critique, habituée aux représentations plus classiques de la réalité. Après avoir salué L’accession de Louis-Philippe, l’œuvre est cachée au public sous le règne du roi et n’entre au Musée du Luxembourg qu’en 1863 et au Louvre en 1874. Il est maintenant perçu comme une œuvre universelle—une représentation de la ferveur romantique et révolutionnaire, héritière de la peinture historique du 18ème siècle et précurseur du Guernica de Picasso au 20ème.

Bibliographie

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *